Gabriel Antoine Pelouze
Biographie
Né le 8 janvier 1910 à Carcassonne (Aude), Gabriel Pelouze y suit des études au lycée Charlemagne puis est employé chez un chapelier d’Espéraza (Aude). Sportif, il se révèle être un remarquable trois-quarts centre dans l’équipe de rugby de Quillan. Habitant Narbonne en 1929, il entre aux PTT comme opérateur manipulant. Titulaire du brevet de préparation militaire élémentaire, il sollicite un engagement par devancement d’appel le 25 avril 1930 et est affecté au 28e régiment du Génie. Le 15 avril 1931, il est placé en disponibilité avec le grade de caporal. Après avoir adhéré en 1933 au Parti communiste, il devient secrétaire de la section de Narbonne. Il se présente et échoue aux élections cantonales en 1935. Il est cependant élu secrétaire général de la CGT-PTT de Narbonne. Sur le plan sportif, il devient un brillant joueur du Racing club narbonnais et de l’Union sportive narbonnaise. Pendant la Guerre d’Espagne, il assure, avec l’aide de cheminots, le transfert vers la République espagnole de combattants des Brigades internationales. Plus tard, il hébergera des familles espagnoles à son domicile.
Rappelé à l’activité le 23 août 1939, réaffecté au 28e régiment du Génie comme en 1930, il est muté au dépôt du Génie 38, le 10 avril 1940, puis démobilisé le 17 juillet 1940. Il reprend dès lors son engagement militant au sein du Parti communiste clandestin et assure le transport et la diffusion de matériel de propagande. Le 6 décembre 1940, des inscriptions « Thorez au pouvoir » sont relevées sur plusieurs immeubles de Narbonne. Les auteurs n’ayant pas été retrouvés, le préfet de l’Aude applique les consignes du ministre de l’Intérieur, à savoir l’internement administratif des militants communistes notoirement connus. C’est ainsi que le 21 décembre 1940, Gabriel Pelouze est interné au centre de séjour surveillé (CSS) de Rivel (Aude) suite à un arrêté pris par le préfet de l’Aude le 10 décembre. Son internement est motivé par son appartenance au Parti communiste comme secrétaire de cellule depuis 1935 et sa participation à la grève du 30 novembre 1938. A la dissolution du camp, les internés sont transférés au CSS de Sulpice-la-Pointe (Tarn). Gabriel Pelouze profite de ce transfert, le 29 janvier 1941, pour s’évader en gare de Bram (Aude). Repris le lendemain par la police de sûreté, il est condamné par le tribunal correctionnel de Saint-Etienne le 10 février 1941 à trois mois de prison pour cette évasion et incarcéré à la maison d’arrêt de Saint-Etienne. A l’issue de sa peine, Gabriel Pelouze est envoyé, le 1er mai 1941, au CSS de Fort-Barraux (Isère). Il y reste jusqu’à un nouveau transfert à la prison militaire de Montpellier le 27 octobre 1941.
Le 11 novembre 1941, il est condamné à Montpellier à 20 ans de travaux forcés par le tribunal militaire permanent de la 16e division militaire pour infraction au décret du 26 septembre 1939 portant dissolution des organisations communistes. En effet, une enquête menée à la suite de l’arrestation en octobre 1941 d’un groupe de jeunes résistants narbonnais fait ressortir la responsabilité de Gabriel Pelouze dans la reconstitution du PC clandestin dans le département. Le 9 décembre 1941, il est transféré à la maison d’arrêt de Carcassonne pour y purger sa peine puis, le 15 octobre 1943, à la maison centrale d’Eysses (Lot-et-Garonne) où il prend un part active à l’organisation clandestine mise en place par les détenus. Du 9 au 11 décembre 1943, il est de ceux qui s’opposent aux Groupes mobiles de réserve (GMR) pour empêcher le départ en zone Nord de 150 internés administratifs. Ces trois journées appelées « Trois Glorieuses » par les détenus, font figure d’événement fondateur du bataillon d’Eysses. Première victoire remportée sur les autorités répressives, elles marquent aussi la découverte par la hiérarchie pénitentiaire de l’organisation clandestine des détenus. En vue de l’évasion collective des détenus, Gabriel Pelouze est désigné comme responsable du préau 4 et est notamment chargé de cacher les armes qui pénètrent clandestinement dans la centrale cachées dans le double-fond des caisses de biscuits. Au plus fort des combats du 19 février 1944, Gabriel Pelouze dirige le groupe de combat qui se lance à l’assaut de la porte Est (murée depuis l’évasion de janvier 1944) et du mirador attenant. Il est alors accompagné notamment de Jaime Sero et Félicien Sarvisse. Après la reddition, il est pris comme otage au quartier cellulaire puis condamné à mort par la cour martiale réunie à Eysses par Joseph Darnand. Dans la cour d’étendage de la centrale, Gabriel Pelouze est attaché à un poteau à l’écart, le dos au mur extérieur est de la centrale, à dix mètres de l’angle. Non atteint par les balles des GMR et des gendarmes, il est abattu d’une balle de revolver par le lieutenant commandant le peloton.
Le 25 janvier 1945, le transfert de ses cendres au cimetière de Narbonne donna lieu à une impressionnante manifestation. La rue Lapeyrade, où il demeurait à Narbonne, fut rebaptisée rue Gabriel Pelouze. Le 20 octobre 1945, il est homologué à titre posthume au grade de lieutenant. Le 17 décembre 1959, il est nommé par un décret du général de Gaulle chevalier de la Légion d’honneur avec attribution de la croix de guerre avec palme. La citation mentionne « Premier résistant de l’Aude ». La médaille de la Résistance française lui est décernée à titre posthume par décret du 7 décembre 2023.